Recueils (suite)

Éclaircies en cours…

Poésie d'un Seul rêve
qu'un nuage effiloche...
sur tes lèvres gercées
géographie du doute

On a vidé nos poches
comme des oiseaux effarouchés
certains matins le Soleil paraît plus grand, plus proche, plus lumineux...
on y repensera quand les verres seront vides

Le regard se détache
la main s'est allégée
le temps a pris son vol

Amour est un carquois d'impatiences fléchées
où guetter à genoux le chant d'une Sirène,
l'Amazone à cheval en écarte les fils
beau rêve que ses doigts rehaussent d'un secret

Le vent déjà disperse
ce que pourtant le cœur a retenu

Ta crinière de pluie
bouche d'Amazonie
tes seins de voie lactée
ton dos sans lendemains
ton cul des grands chemins
ton sexe de rose rose
tes mains du lit de la rivière
tes yeux de terre brune et de forêts profondes...

Pain béni, Croix du Sud
aurores grappillées, aurores gaspillées
sous la poudre d'un Ciel éparpillé demain
l'avancée du dégel a fortifié nos armes

Amour est un carquois plein de rêves brûlant
leurs ailes sur un toit de givre et de Silence...

Nos baisers ajustés
dans la ville refuge
Chaque détail en connaît beaucoup d'autres qui fuient

Météo favorable
éclaircies dans le doute
Un chagrin se dissipe à l'ombre de nos doigts

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Amour est douce morsure
épine de ronces, sucré comme du miel
Amour est douce morsure
Mais cette nudité en est-on jamais sûr(e)?
La distance le grandit, élargit son emprise...
Ta présence le montre et c'est une évidence:
tes yeux sont ce Mystère à jamais familier...
et ta bouche un secret pas toujours bien gardé!
Mais cette nudité en est-on jamais sûr(e)?
Tenace et capricieux, Amour est ce contraste:
tantôt se fait doux comme l'agneau fidèle...
et tantôt se rebelle! se cabre et rue dans les brancards!

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L'étoile indique le jour
La langue en repousse le sens

L'ancre fixe le rêve
Les larmes partageront cette douleur

Les anges naviguent à contre-jour
L'abeille ne compte pas ses heures

Le vent soulèvera nos tuiles
Tes paupières indiquent le chemin

L'ongle incise la terre
Nos mains fleuriront au désert

L'oiseau ébouriffait le Ciel
Que son aile adoucisses les chagrins

La bouche dit ce mystère
Dont ta gorge a nourri l'impatience

L'arbre secoue la lumière
Son ombre en cherche les racines

Le pain durcit chaque jour
Pour que la nuit réveille le doute

La Lune nous éblouit
Sa lumière absorbe notre impatience

Le moulin distribue sa chance
Ton regard ouvre sur d'autres issues

L'écluse a mouillé mon cœur
L'oiseau étincelait au-dessus

Les nuages se dispersent en grappes
La lampe a rassemblé le soir

Si chaque pierre était une carte du Monde
Chaque pierre nous emporterait au cœur de l'immobilité

Paysage accordé
La marche est sans obstacle

Nos genoux en cascades
Énergie maintenue à l'apogée du Temps

Le Ciel appelle une espérance
Le pas déroule notre attention

La jambe ignore le compas
L'attente a réveillé nos dieux

Dans le gosier du temps

Ce recueil est paru en 2004, dans une version légèrement différente et sous le même titre, aux Éditions « Gros Textes »

L'air
pistache du Soleil où mes mains prennent place
car bientôt sa lumière
testicules d'azur
tombereau virginal
y déverse nos traces
maintenant c'est une Source
impatiente
et boivent les vieux cerfs et leurs enfants de soie...


Insistance verticale, résurrection de l’œil
lointains désembaumés de la mémoire
où flotteraient des sarcophages...
La peine a mis nos pieds à plat, nous a fermé les yeux
j'ignore ses couleurs, mais c'est de cette pourriture
que viendront la lumière et les pruniers en fleurs...


Pierres pensives
j'applaudis l'hirondelle au grès des angles morts
touffes du Chagrin,
loin des pubs mensongères, très tendance boursière,
l'espoir est noir et blanc, souffler n'est pas jouer
quand je reprends confiance en tes paumes gercées


Calme brûlé, photographies tremblées
alors nous glisserons comme des bulles
voiture qui sent bon et toi qui sait que je préfère
noyer les poissons rouges
dans l'atmosphère


Insistance verticale, on s'attache les mots
et l'alpage blanchi, et le vent virginal
Insistance verticale, cercle du bénitier 
sur ce bout de papier que l'Horizon déchire.
Insistance verticale
dans tes bras qu'arrondissent des dieux en vacances
je brûle à petit feu les carquois de l'enfance.


Je veux suivre une trace, nuages dans le Ciel de leurs métamorphoses 
Je veux suivre une trace...Ô Couronnes du temps!
Vrai gibier dont l'amour a chanté la détresse...
Je veux suivre une trace aux doigts désarçonnés
chagrins évaporés
sans arme ni bagage et demander mon reste


Ces grottes préparées maintiendront l'avenir
captif
terre d'ocre
égale aux hommes de la petite fumée:
juste le temps d'aller cueillir entre nos cuisses
l'apocalypse des roses...


Origine
ce désir qu'on accroche battant
avec de petits pas
avec des assemblages
aux ailes d'un miracle!
C'est ainsi qu'une abeille ou qu'un dieu mélangé
accueillera d'une secousse
hors de ses gongs la rhapsodie des anges...
Bientôt nous tracerons, vivante sous l'écorce
la tresse de nos doigts...


Le bleu du Ciel étonne
nos âmes sous caution
pupilles en cavale, ordre de dispersion...
Le bleu du Ciel étonne
ce chagrin sous la cendre aux semelles usées 
tant de rêves à vendre...
Le bleu du Ciel étonne
nos larmes asséchant cet éclat dans tes yeux 
son unique fontaine...


Quatre mais de papier traceront l'arabesque
où ne luit tout entier qu'un buisson de Silence.
Quatre mains de papier traceront l'arabesque
d'une abeille à mes pieds vois mon sang qui se glace!
Quatre mains de papier brûleront au bûcher
plus beau dans ce mystère
qu'aux angles arrondis la musique des sphères...


Cavalcade d'oiseaux
immortel éventail de nos chagrins à vif
un peu de sel sous les sabots de nos rêves impairs
pour voir venir la chance, ses souvenirs entiers!
C'est que le ventre a faim, c'est que la main tâtonne
au chœur aveugle des violons...


C'est au creux d'une vague
deux pieds en suspension, du plâtre dans les yeux
l'accumulation fera le vide
le vide a préparé le sens...
Ainsi l'écart, digestion victorieuse
propulsera dans tes narines la mousse en feu de nos étoiles brèves...


Il caresse les plis de sa robe l'éclat
cuir de nos habitudes
cet éperon de velours...
Car c'est du bout des doigts que la prière des hommes
leur ouvre en grand les portes du Soleil!
Car c'est dans ces grimoires d'enfants que vogueront encore
deux cents cocottes en papier!


Quelque part en exil, ce papier qu'on déplie
genoux contre genoux comme une eau de jouvence...
Quelque part en exil
si ma langue s'obstine étrécissant le Doute
dans nos crânes à vide...
Quelque part en exil un rayon du Soleil
notre vie vagabonde et ne tient qu'à ce fil...


Si la chanson nous tient feuillages rassemblés
visages adoucis
racines enlacées...
Si la chanson nous tient rebelles attentifs
pieds et poings libérés
crinière aux quatre vents...
Si la chanson nous tient généreux héritiers
amoureux aimantés de nos âmes enfuies
comme aux rêves enfouis leur unique Festin...


Sur l'établi parurent
résurrection du Doute
oracles en poussières
ces charmes qu'on attache au front d'anciens amers....
C'est pourquoi je préfère
dans la paume de tes reins
dans la plume de tes mains
garder mon alphabet à col de cygne:
les cigarettes de l'hiver
toujours
brûlent en nous le Paradis...


Abreuvoir du Silence entre ses notes claires
l'eau
coule de source sûre et circulaire...
C'est maintenant qu'il faut s'y préparer
(sans trop y penser)
car l'angle des étoiles y fait un feu plus qu'à l'accoutumée...
Maintenant qu'il voudrait bien ne plus se taire
tremblement des lilas
âcre odeur de pétrole
et
ravines recousues
qu'à quatre mains son ange nous guérisse...


Racines éparses
fouillant au Ciel l'éternité du Doute!
C'est que nos têtes emplumées,
c'est que nos têtes emmêlées, fiévreuses
s'échangent un mystère entier...
Alors pour ceux qui reviendront, mendiants et taciturnes
voici la Nuit réconciliée...


Grands esclaves sonores
pulsations médiatiques en boucle
tant de rêves en vrac
tant de rêves à sac
car c'est le dos au mur 
méditation sous vide
rafales d'étincelles
sans étancher la Soif!
Alors on a cherché l'accord
pieds nus sur Terre d'Ocre
et sur le bout de chaque doigts notre jeunesse est en lisière
sursis de beaux rivages
sabres de magiciens hilares
cette fleur où ma peau s'accroche à l'espérance
puis
comme un retour aux sources sûres
tracer à main levée
cette voûte qu'un Doute élargirait encore...


La mort n'en saura rien
qu'une fève arrondie dans ma bouche et le pain
gardera son mystère,
La mort n'en saura rien
qu'une abeille obstinée découpe du chagrin
repli du désespoir,
La mort n'en saura rien si la mer se retire
carcasse musicale aux anciens coquillages
qu'une épave attentive au Seul sexe des anges...


Mosaïque du Ciel
beaux rêves en déroute
sous la cendre son miel a fait glisser le doute,
Mosaïque du Ciel
je battrai la campagne
l'alouette me nargue enveloppe l'Azur,
Mosaïque du Ciel
décombres du Silence en partage du jour
dans tes yeux qu'arrondissent mes larmes ensuite
l'amour à contre-jour...


C'est dans ta chevelure mauve
espace où gravite
l'étoile des confins
Terre spongieuse où croiser cette offrande
exquis esquifs
nos pieds en suspension...
Et maintenant si ton sourire
préserve sa lenteur
il suffira qu'un escargot
il suffira qu'une hirondelle
nous emporte captifs...


L'aiguillon du Mystère
n'ignore pas
douceur exquise aux marges des salines
plus tard il nous dira qu'inventer le bonheur
exigerait le mauve des outils
c'est alors qu'une flèche
empennage nuptial
tracera sur ce rêve
la brume opaque des tisons...


Abreuvoir de l'Oubli
ce rire est transparent où nul écho ne songe
qu'un avenir étroit nous rendra la monnaie,
Vagues interminables comme un allaitement des astres
et sur la rouille des rails
notre attente effacée,
Puis j'ouvrirai ta bouche
ô défunte symétrie
pour y sculpter ma langue et noyer sa douleur...


Mon âme vagabonde et ne sait si toujours
tourne tourne la Terre autour de son Soleil,
Mon âme vagabonde et sans cesse m'étire
car à l'amour je tiens et de la tête aux pieds,
Mon âme vagabonde
d'une poche percée vers une autre qui donne
sa langue de vipère à tous les chats de gout-
tière...


Caresse du lichen
le courant passe entre les mots
court-circuite le cœur,
Attentive pudeur
raccommodant le Jour
cette mémoire enfouie sous un éboulement de fleurs
car c'est au cœur des choses
toujours
que la nuit nous échappe...


Dans le gosier du Temps j'écarterai l'Absence
chagrins à prix coutant
fermé pour inventaire,
Dans le gosier du Temps j'écrirai ce Silence
plus tranchant que l'acier flexible des avions,
Dans le gosier du Temps
rêves effilochés toutes taxes comprises
dans ce gosier pourtant j'enroule ma prière
paupières ajourées tout autour de la Terre


L'Ange des pauvres mots suscite l'espérance
sillage dans le marbre
j'emprunterai sa chance,
L'Ange des pauvres mots redessine le Jour
comme un Cercle doré hors du calendrier,
L'Ange des pauvres mots s'allonge sous l'étoffe
rêche
nos chagrins tête-bêche
nos chagrins décousus
l'Ange des pauvres mots qu'on lui fasse les poches!


J'ai creusé le sillon du enfance électrique
locomotive courbe
locomotive sourde
hurlante sur les rails et sous les ponts d'un seul désir...
Ainsi la langue fait le lit des amours sûrs
morsure au bec
de tout oiseau jamais fané:
c'est que toujours nous resterons
fruits
c'est que toujours nous resterons
cette dentelle est l'élastique de nos jours...


Ville vorace
verticale et vainqueur
de toutes nos vertèbres
poings levés sous les baisers de leurs fières bannières.
Alarme soudaine
éloignez vous de la bordure du quai vous le savez nos armes
sont à très haute fréquence!
Et tout ça pendant que l'enfant dans les bras nus de celle
qu'il émerveille,
et tout ça pendant que l'enfant 
nu comme l'abeille
rose comme du miel
rêve du sang des fièvres abyssales...


Draperies insolentes
ce ventre de goudron déchaîne l'Océan
pétrifiant l'espérance
tous ces oiseaux noircis, gluants
s'empêtrant de varech, asphyxiés de goudron,
Draperies insolentes
la poubelle dégorge un rêve de plastique
l'emballage nouveau conditionne le geste
diminuant le Ciel,
Draperies insolentes
la main du réfugié ne connaît plus la porte
qu'on ouvre les yeux fermés
ni la pluie, ni le vent
ne peuvent échauffer le cœur des absentés


Rosaces du Midi
dans tes mains l'Avenir
tracera ce jardin racines enlacées,
Rosace du Midi
l'Univers se dilate
fragile et minuscule cette Terre nous é-
chappe!
Rosace du Midi l’allégresse du site
pierres d'angles en tresses
leurs anges ajourés
illumine d'un coup d'aile sous les paupières!


Dans ce Cercle des bras je veux fendre les flots
récolter la tempête

poussière sur les toits, cendre des cimetières
trop de béton armé!
Dans ce Cercle des bras j'entasserai la sève
tendresse vaginale, ô sang des orchidées...
Dans ce Cercle des bras c'est pour dompter le vent!
Dans ce cercle des bras c'est cent mille baisers
fur-
tifs


Nomades accomplis sous arches vagabondes
sous arches vagabondes
dérivant en Lisière loin
du doute qu'on calcule au gabarit des armes
usinage des pièces
de nos hésitations en boucles
oui mais
ligne du cœur en haut
tes paumes à l'affiche à deux doigts de l'amour
et
déjà leurs bouches enchantées bien plus
qu'un chagrin qu'on étire aux quatre coins du Ciel
alors mettre les points sur les i
gare aux contrefaçons l'espoir est sans escale
c'est qu'on a pris conscience, c'est que l'intelligence est mûre
Découvriront-ils les mêmes cercles?
Les mêmes marges à venir?
chanteront-ils encore et d'une voix plus douce?
Ô
Que de nos paupières accordées se détachent le rêve et sa lucidité


Si ta bouche s'enroule
courbure de la Terre
contre vents et marées j'ajusterai la Cible!
Si ma bouche s'enroule
trop de papier mâché
la fatigue tient bon j'ai rempli la corbeille...
Si ta bouche m'enroule
ô vertige sonore
fi!
Je file entre les plis de la mélancolie


J'habite une éclaircie d'allégresse calcaire
forêt de cygnes
pages blanchies
neige soufflée
comme en haut des falaises un vertige toxique
J'habite l'éclaircie alors pourquoi ne pas
encore au Seuil
respirer ce matin les Ailes du grand large?
J'habite l'éclaircie alors pourquoi ne pas
déjà vainqueur
ajuster cet éclat d'un rêve stupéfié?


Planche de salut
qu'au rivage une houle dépose fervente
parmi les bois flottés
joyeux pistil aussi
tes reins noués vers un nouveau départ
ailleurs c'est un baiser qui lève
gibier d'odorante bruyère
où la mort a plié les sables du remord...


Belles planches qu'on déplie d'une main dédoublée
contreplaqué du rêve en attente des mots
cette magie dans l'air a conservé nos larmes
a conservé nos armes
C'est qu'un jour il faut prendre son tour
de garde
quelle odeur de café ne jette vent debout?
Maintenant c'est à la Terre et sous les bois mouillés
son murmure très bas nous dénude les pieds...
Le Temps n'est plus compté