Les trains qu’on peut tracer du doigt
Pour Perrine, Élise, Mathilde






De la lourde lisière alanguie du lilas défrisant sur sa nuque l'enfant qui affleure s'éparpille ce cri sans appel à la nuit cette joue saisissant l'impossible retour d'une écume que gerce un chagrin de velours. Je desserre les plis, dérives impatientes que ton cœur assoupli retient près du rivage du Silence en partage étoilé, chute libre et puis l'aube et vaincus les antiques saccages. Inutile ornement d'une étrave sonore comme un rêve écarté de tous les coups du sort sur ma peau d'affranchi tu largues les amarres et la houle t'emporte où la mer est féconde... Inutile ornement d'une étrave sonore comme un rêve écarté de tous les coups de sonde sur ta peau d'affranchie je largue les amarres et la houle m'emporte où la mer est profonde... Détaché du Silence impeccable des dieux privilège aboli d'une obscure magie je cherche en m'inclinant l'invincible harmonie du Hasard et d'un rêve alourdissant tes yeux. Si j'entends quelque fois le tam-tam aurifère qu'accompagne l'écho de vos ombres fertiles vocables imminents, c'est pour tendre ma peau par-dessus vos silences drapés d'oripeaux. Car si l'ombre portée du cyprès solitaire ne dérange pas trop l'hôte des cimetières maintenant convaincu d'ignorer son parcours aux anges accroupis qu'attise ma bravoure je dédie les anneaux de ce cri de colère!

Le choc des particules a creusé le socle de nos rêves
Quand ses antennes de bambou auront disparu à l’Horizon le Soleil, ignorant l’échancrure de la Terre, tissera de nouveau le cœur intact de ses ennemis
La ronce vivace n’attendra pas le crépuscule pour lier la gerbe de nos étonnements
Tandis que la Terre, exposée sans défense aux songes astucieux, fait claquer le désir au-dessus des châteaux
Et c’est parce que tu es l’herbe folle que l’écriture a tirée hors de mon ventre, et c’est parce que tu es aussi la bouche verticale où s’affronte les anciennes figures de Terre cuite que nous irons encore interroger les immortels oiseaux venus faire leurs nids dans la pâte songeuse de l’Humanité
Car rien ne pourra faire que nos regards transparents ne soient déjà cousus l’un contre l’autre sur la robe indiscrètes et vagabonde qui les a mis en fuite
L’ivresse des anges n’impose aucun délais : ni aux cigales insensées, ni à cette mémoire qui, telle une plante vivace, nous a blanchi les yeux
Et j’ai ainsi l’espoir, en employant un langage toujours plus précis, de pirater définitivement l’optimisme de mes interlocuteurs
Ce soir les flammes bleutées tiennent interminablement dans l’âtre un étrange conciliabule et je sais maintenant, d’un savoir aussi sûr que mystérieux, que si je m’approchais pour leur voler leur secret ma joue s’enflammerait comme de la paille sans que j’en ressente la moindre douleur
Avant de s’endormir les enfants nous ont dit qu’il voulaient marcher sur de l’osier tressé
Pour la première fois la sirène venait de l’intérieur, accompagnée d’un côté par des soleils transparents et de l’autre par la bouche sublime de l’aquarium
Le lit de nos amours s’entourera bientôt d’une multitude de poissons lumineux et furtifs dont les nageoires, venant partout frôler notre peau, transformeront ton rire en chapelet de bulles

L’oubli fait des trous dans nos entrailles : certains ont déjà la forme d’une étoile
Un cœur de mousse bat au cœur de nos passions élastiques
La fatigue tenace, en dénudant plus tôt que prévu le fil de nos habitudes, a fait décoller nos oreilles en direction des étoiles
Le trop plein d’une vague effaçant la brûlure du sel tu me dis le naufrage, tu me dis le velours, sur des briques d’amour
Car il est sûr que le Ciel, même si on le mettait entre d’infini parenthèses, finirait tout de même par s’échapper. Alors ne ramonez plus la suie que dépose, sur vos secrètes conduites, l’Astre qui flambe
Criblé de balles perdues ton corps amarré sur mon corps occupe le centre du paysage et, sur mes pieds chauves, tes cheveux enivrés tracent déjà toutes nos lignes de fuite Et pendant ce temps la musique, de sa pointe lumineuse et douce d’étoile filantes avait tissé tout autour de nous son cocon de fougue précieuse et de soie délicate
C’est parce que les pirogues pourrissent lentement que leurs esprits habiteront longtemps encore les grands arbres en surplomb
Les trains qu’on peut tracer du doigt, effaçant la buée sur des vitres trop froides, conduisent tous au cœur de la même bataille
Le Dieu de la Consolation s’appelle aussi l’Imprévisible
