LAMPES DE POCHE

(124)L’humaine culture, si fière de ses monuments et autres vénérables vestiges n’est-elle donc que l’écume passagère et ô combien fragile d’un inexorable, inaccessible et profond mouvement aussi nécessaire et puissant que ces courants qui, parcourant inlassablement de vastes océans finissent immanquablement par déposer sur un sable brûlant ces énigmatiques bois flottés qu’un grand Soleil déjà sèche et blanchit.

(125)Par l’écriture comme par la lecture qui lui est indéfectiblement attachée nous continuerons encore longtemps cette exploration joyeuse et tâtonnante d’un labyrinthe dont les innombrables culs-de-sac, impasses ou autres voies sans issues sont bien chaque fois le plus inestimable et le plus stimulant des dons de l’Originaire, inépuisable et capricieuse Générosité du plus Grand des Hasards!

(126)L’anticipation angoissée d’une possible souffrance à venir constitue pour l’esprit un aiguillon si nécessaire que la suppression complète et définitive de cette précieuse souffrance constituerait immanquablement pour ce même esprit l’annonce d’une prochaine et irréversible disparition…

(127)Notre espérance pas moins que notre Colère pour bâtir et rebâtir la maison des souvenirs…

(128)La folle intuition de l’Originaire, imprévisible et Généreux Hasard ne nous inspirera jamais rien de plus dangereusement excitant qu’une envie de fuir au plus vite, effrontément juché sur les ailes d’un immense et tourbillonnant éclat de rire!

(129)Le chant Seul pour nous délivrer enfin et avec autant de grâce que de légèreté d’un irrépressible, insatiable et décidément très contagieuse demande de reconnaissance, de compréhension et pour finir de consolation…

(130)Le langage permet de cerner, de distinguer aussi clairement que possible et surtout d’imaginer pouvoir fixer pour un temps nombre de ces délicates intuitions que nous livre à toute heure et sans compter l’incessante, incontrôlable et foisonnante activité d’un inextricable réseau de neurones enchevêtrés.

131)Notre volonté de maîtrise et de contrôle ne se libère jamais mieux ni plus complètement d’elle même que lorsqu’elle se livre tout entière, sans calcul ni préméditation aucune à l’Originaire, inépuisable et très capricieuse générosité du plus Grand des Hasards.

(132)La Colère n’est-elle pas l’enfant naturel le plus légitime et le plus convaincant de l’Ultime et insaisissable Vérité?

(133)Le mal contre lequel nous ne cessons de lutter est tout autant en nous qu’autour de nous de telle sorte que cette lutte qui nous divise est immédiatement aussi une lutte contre ce qui nous divise…

(134)Écrire et réécrire encore et toujours comme on dicterait son testament: espérant pouvoir faire durer le plaisir le plus longtemps que possible!

(135)La Générosité de l’impossible et Grand Amour Seule pour offrir à l’échange et au partage d’indispensables caresses l’heureuse perspective d’une interminable et joyeuse partie de cache-cache…

(136)L’expression de la révolte est toujours déjà la Révolte elle-même, toute entière et sans partage!

(137)L’incontournable, imprévisible et tâtonnant parcours de notre indispensable et double labyrinthe à Ciel Ouvert et à Claire Voie ne peut pas ne pas nous faire passer et même repasser sans qu’il soit toujours possible de s’en rendre compte par une multitude d’innombrables embranchements, carrefours ou autres bifurcations dont une part non négligeable continuera encore longtemps d’échapper à notre légendaire vigilance.

(138)Peut-on prier le Hasard autrement que pour rire, autrement que pour en rire?

(139)Notre volonté de maîtrise et de contrôle ne se libère jamais mieux ni plus complétement d’elle-même qu’en plongeant résolument, tête première et les yeux fermé au centre indéfiniment déplacé du Paysage sans nom…

(140)L’angoisse habite avec bonheur au Centre de ce Seul grand Vide indispensable au souffle qui l’attise

(141)Ne devrait-on pas décerner sans tarder et comme par anticipation une médaille de Sagesse à tous ceux et à toutes celles qui travaillent déjà à leur propre fragmentation, à leur propre dissémination ou à leur propre dispersion?

(142)Toute pensée si libre et indépendante qu’elle puisse paraître ne peut que se nourrir en secret et peut-être même sans s’en apercevoir d’une croyance ou d’une conviction aussi jalouse qu’irrationnelle et qui, puisée à la Source du Grand et Généreux Hasard, ne manquera jamais d’exercer sur elle un véritable chantage

(143)Pour réussir à se dominer soi-même avec profit il faut entretenir régulièrement en nous les forces capables d’assurer cette domination et, pour ce faire, toutes celles qui, également en nous, sont capables de leur résister en les combattant au risque de les renverser!

(144)C’est dans ce qu’elle a de plus inattendu pour nous que la très inconséquente Générosité du plus Grand des Hasards nous apparaît comme ce qu’elle a toujours déjà été: le comble de l’ubiquité

(145)L’art si labyrinthique et si ancien de l’écriture aura bien été la plus astucieuse et la plus déroutante des inventions: permettant de franchir instantanément et autant de fois que nécessaire à notre caprice et à notre bonne humeur le passage ou la frontière entre les arabesques du visible et les plus secrètes acrobaties de l’esprit!

(146)La folle idée du libre arbitre est bien cette ruse géniale grâce à laquelle l’esprit, toujours aussi imprévisible et capricieux, réussit à concentrer suffisamment d’énergie et d’enthousiasme pour se propulser d’un coup jusqu’au-delà de tous les possibles de l’Horizon…

(147)Faudrait-il donc avoir éprouvé soi-même l’insupportable de l’asservissement, de l’injustice ou de l’humiliation pour pouvoir se révolter vraiment et avec conviction contre toute forme d’asservissement, d’injustice ou d’humiliation?

(148)La folle intuition de l’infini est l’inépuisable Source à laquelle l’Esprit, toujours aussi imprévisible et capricieux vient puiser l’inspiration de ses plus téméraires comme de ses plus spectaculaires acrobaties

(149)Aussi Généreux que définitivement injustifiable le Don de l’Energie reste et restera jusqu’au bout sans autre intention que lui-même…

(150)Il est assurément indispensable à notre légendaire et capricieuse bonne humeur de pouvoir à tout moment poser les questions les plus inattendues, les plus saugrenues ou les plus dérangeantes et même aux murs s’il le faut!

(151)Les masques ne nous seront pas moins nécessaires que des ailes lorsqu’il s’agira de survoler en dansant l’abîme de l’Unique, Ultime et insaisissable Vérité.

(152)Dieu merci il semblerait qu’un léger décalage ne doive pas nécessairement et indéfiniment subsister entre l’insaisissable de la Vérité et l’insupportable de ce qu’elle aurait enfin à nous dire…